Les enduits en terre : projection sur la façade Sud (1ère couche)
La façade Sud est la seule qui soit enduite, les autres façades de la maison et le garage sont bardées voir ici. Comme cette façade n'est pas protégée et que la paille craint la pluie (la paille pourrirait et ne serait plus isolante), une ossature déportée avait été montée et dessus, des bâches fixées, par Joël, Pascal et Ludo pour travailler à l'abri.
Sur cette façade, les bottes sont posées à plat, les brins des bottes s'imbriquent les uns dans les autres avec la compression exercée sur les bottes, le mur est donc relativement plan sur chaque colonne de paille, et donc prêt à être enduit tel quel voir là.
En revanche, l'ossature entre les bottes se retrouve au milieu de l'épaisseur du mur mais reste visible. Les espaces entre les colonnes de bottes font 10 cm côté intérieur comme extérieur, ce qui constitue un pont thermique relatif (le bois est un isolant moyen) et un trou que l'enduit seul ne peut suffire à combler.
Nous commençons par pointer sur l'ossature (pour l'accroche) puis nous remplissons ces espaces avec du mélange terre-paille voir ici, celui-ci étant fortement fibré, il permet de rattraper l'épaisseur des bottes de paille et de faire une correction thermique.
Cette étape est faite à l'automne 2013, ce qui laisse plusieurs mois à cet épais mélange pour sécher en profondeur.
Pour isoler les éléments en bois (poteaux, ceinture entre le rdc et l'étage etc) de la façade, la paille n'était pas utilisable, nous avions donc utilisé des plaques de liège expansé noir (visible à l'horizontal sur la photo précédente). Comme le liège est enduisable, mais plus difficilement que la paille, nous préparons un mélange sable 0-2 et argile que nous appliquons pour faire la couche d'accroche en vue de l'enduit.
La partie verticale le long de la pièce de bois est déjà enduite et fissure un peu après séchage, mais ce n'est pas gênant car cela donnera l'accroche de la couche suivante.
En juin, après que ces étapes ont été réalisées et que ça a bien séché, nous griffons avec une pointe le mélange terre-paille, très dur et un peu trop lisse, pour faire l'accroche de la couche suivante.
La façade prête à être enduite ressemble à cela :
L'enduit :
Pour enduire cette façade, nous utiliserons de l'enduit à l'argile qui sera projeté avec un sablon (et un compresseur), ce qui permet d'enduire la façade en une journée, de façon homogène et avec une bonne pénétration.
Pour les enduits extérieurs sur de la paille, on peut au choix enduire directement avec de la chaux ou faire une première couche avec de l'argile avant la couche de chaux. Les deux solutions sont bonnes, mais chacune présente des avantages et des inconvénients différents.
Nous avons choisi d'enduire d'abord avec de l'argile, car les enduits à l'argile ont une bonne "affinité" avec la paille (facilité d'application notamment). De plus, comme la façade Sud est très exposée à la pluie malgré les 2 protections (toit et casquette), la moindre fissure dans l'enduit final en chaux permettrait à l'eau de s'infiltrer dans la paille. Avoir une couche d'argile en dessous protègerait un peu la paille paradoxalement : quand l'argile prend l'eau, il est dégradé à force (c'est pourquoi il ne peut pas être l'enduit définitif), mais dans un premier temps il absorbe l'eau et est imperméabilisant pour la paille en dessous (comme quand il est utilisé au fond d'un bassin de rétention) et gonfle. En cas d'entrée d'eau par une fissure dans l'enduit final qu'on ne verrait pas (car petite et/ou placée à un endroit peu visible), le gonflement de l'argile ferait craquer fortement l'enduit du dessus (voire se décoller) ce qui nous alerterait et nous permettrait de réparer l'enduit à la chaux avant que la paille n'ait été atteinte.
L'enduit en argile ne peut rester tel quel, à moins d'avoir des débords de toit suffisamment conséquents pour être sûr que l'enduit ne prendra jamais l'eau. Comme notre débord de toit est calculé pour laisser entrer le soleil par les fenêtres l'hiver et le bloquer l'été, il est inférieur à 1m, de même pour la future casquette au dessus des baies vitrées, ce qui ne constitue qu'une protection partielle face à la pluie.
Cet enduit sera recouvert plus tard par un enduit à la chaux pour imperméabiliser la façade. La chaux a l'avantage d'être imperméabilisante mais perspirante, contrairement au ciment : la vapeur d'eau dans l'habitation n'est pas emprisonnée dans le mur et peut s'évacuer vers l'extérieur, sans permettre pour autant à l'eau de pluie de pénétrer le mur.
Comme cet enduit doit être projeté, il faut qu'il soit d'une consistance qui permette qu'il passe en machine. Et comme cet enduit est d'une importance capitale pour protéger la paille en dessous, il faut qu'il soit parfaitement dosé pour ne pas fissurer (ce qui n'est pas gênant si tel est le cas dans la maison, car les couches suivantes s'en servent d'accroche et corrigent ces fissures).
=> Pour ces 2 raisons, nous achetons de l'enduit prêt à l'emploi où il ne reste que l'eau à ajouter, et qui est formulé pour pouvoir être projeté. Nous achetons donc un big bag de torchis à projeter d'1 tonne de chez Argilus pour toute la façade (environ 35m2) voir là.
La projection de l'enduit :
Pour cette journée de chantier très physique, nous sommes aidés par Joël et Marylène, les parents de Ludo, grands fidèles du chantier, et par son frère Thibault, maçon, qui nous aide à toutes les étapes techniques de maçonnerie.
Le mélange est constitué d'argile en poudre, de sable et de paillettes d'orge et se présente ainsi :
Après passage en bétonnière et adjonction d'eau, on obtient ceci :
Je suis à la bétonnière pour faire tourner le mélange ; les brouettes pleines sont amenées au pied de l'échafaudage par Joël ou moi, Marylène remplit les seaux à la pelle, puis Joël monte les seaux avec la poulie prêté par Pascal, mon père.
Avec le seau, Ludo remplit ensuite le sablon que porte Thibault :
Puis quand Thibault appuie sur la gâchette, l'air du compresseur projette l'enduit sur le mur au travers de trous en bas du sablon.
Entre 2 projections...
Une fois toute la surface couverte et les différences de niveau partiellement comblées, une trame de verre est appliquée dans l'enduit par Ludo et Thibault après découpage par Joël et Marylène :
On obtient ceci :
Une fois la façade recouverte d'enduit, le big bag a été utilisé presque entièrement (à une brouette près), mais la journée a été physique pour tout le monde : 1 T + 320l d'eau, soit 1,32T d'enduit manipulé par chacun, au moins une fois, au seau, à la brouette, la pelle ou au sablon, et sous la pluie l'après-midi, ce qui a fait de cette journée une étape difficile, mais quelle satisfaction à la fin de la journée de ne plus voir la paille et d'avoir un beau mur !
Merci encore à Joël, Marylène et Thibault !!!
La façade Sud est la seule à être enduite.
Pour gérer les angles de cette façade et la séparation avec les 2 pignons voisins bardés, une première pièce de bois avait été posée le long du mur voir là, en fin de page, avant la pose du bardage sur cette pièce et le bardage était posé sur cette pièce jusqu'à la moitié de celle-ci. Cette pièce s'arrête à la limite de la première couche d'enduit.
Puis, une deuxième pièce de bois est préparée en atelier par notre charpentier et posée par Ludo et Joël après des petits ajustements.
Cette pièce chevauche légèrement le bardage et déborde au Sud de la première pièce, avec un sillon pour l'insertion dans celui-ci de la 2ème couche d'enduit.
Ainsi, le retrait de l'enduit ne sera pas visible et c'est le bois qui formera une barrière contre les entrées d'eau dans le mur (sinon, l'eau pourrait pénétrer dans le mur via les fissures dues au retrait de l'enduit au séchage).
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